Comment une agence a préféré copier mon illustration que respecter mon droit d’attribution
L’illustration « Content is Like Water » et l’attribution Creative Commons
Tout commence ce matin, quand un ami m’envoie la page d’une agence sur le responsive. Ils y affichent une traduction de mon illustration » Content is Like Water « (citation de Josh Clark qui reprend lui même Bruce Lee mis en image par moi même). Cette illustration est sous licence creative commons. Pour l’utiliser, il suffit de me créditer, ni plus, ni moins. J’ai même mis à disposition le PSD. Et je suis ravie lorsqu’elle est partagée. Seul bémol, la licence demande à ce que l’on me crédite comme auteur, ce que l’agence ne fait pas (j’ai vérifié plusieurs fois dans la page).
Que l’on soit clair dans ce qui va suivre : ce n’est pas la copie (pourrait-on d’ailleurs être en droit de considérer que c’est un plagiat) qui m’ennuie dans cette histoire, je travaille dans le web, j’ai presque l’habitude (hélas), mais l’attitude de préférer copier une illustration (qui du coup n’est plus très jolie) que de conserver l’illustration originale sous Creative Commons qu’ils avaient le droit d’utiliser en respectant simplement le droit d’attribution de l’auteur prévu dans la licence. Le but n’est pas de me victimiser, mais faire prendre conscience que même si du contenu est » gratuit » sur le net, il y a des licences et des conditions à respecter pour l’utiliser sur son site.
J’ai l’habitude des gens peu scrupuleux qui utilisent cette image sans me créditer, ou juste de personnes qui ne sont pas au courant (ça arrive) qu’il faut créditer les œuvres sous licence CC-BY. Comme d’habitude donc je demande gentiment sur twitter et par mail que mon droit d’auteur soit respecté c’est à dire me créditer, ou me mentionner comme auteur.
Le remplacement de mon illustration par une pâle copie
J’avoue que la suite, je m’y attendais pas. D’habitude les agences ou blogs qui ne me créditent pas s’excusent, rectifient le tir, voir même me disent qu’elles connaissaient pas mon boulot mais que c’est sympa (true story). Bref, j’ai l’habitude de faire face à des gens honnêtes qui n’ont pas forcément eu conscience de la violation de droit d’auteur. Mais pas ce matin. Au lieu de simplement me créditer et continuer à l’utiliser l’illustration, l’agence a préféré créer une pâle copie de mon travail. Ce qui est triste c’est qu’ils ont refait l’illustration en HTML, ajouter mon crédit aurait été ajouter une ligne de HTML. Refaire l’illustration leur a donc pris plus de temps.
La réponse : » Bonjour, l’image a été entièrement remplacée, il n’y a donc plus de violation « . Et par entièrement remplacée, entendez » on a gardé votre DA et on a juste changé les icônes ».
Je me permets donc de leur signifier que non, je ne suis pas satisfaite et que la nouvelle version est devenue un plagiat.
La réponse ne se fait pas attendre, puisqu’on me renvoie vers un article du droit français sous couvert de » Les » idées » ne peuvent être protégées au titre du droit d’auteur ».
Sauf qu’il y a là encore un bémol : mon illustration n’est plus une idée. C’est une réalisation concrète et matérielle d’une idée, à savoir cette idée est devenue une oeuvre. Et au nom de cela elle est donc bien protégée par le droit d’auteur. Je vous laisse la réponse de Julien Moya (auteur du kit de survie pour créatifs et de Profession Graphiste Indépendant) pour plus de détails (à lire de bas en haut merci twitter) :
Cette histoire me laisse un petit goût amer. Que Cera Interactive préfère copier et piller mon travail que de créditer une illustration que j’ai moi même mis à disposition sous licence Creative Commons me sidère. Ça frôlerait presque le ridicule si ce n’était pas mauvaise foi.
Certains m’ont demandé à quoi je m’attendais de la part d’une agence qui tient des propos sexistes sur twitter et finit par expliquer sur son blog que non non c’était juste une étude sur le bad buzz ? Pas grand chose, c’est vrai, mais je pensais pas qu’ils iraient jusqu’à copier mon contenu plutôt que de me créditer. A moins que ce n’ait été qu’une étude sur les licences Creative Commons et les droits d’auteur :D ?
Les petites piques via twitter
Bien sûr comme souvent avec Cera Interactive, la discussion se termine par du mépris, de la condescendance, un montage photo sans oublier une attaque personnelle et une réponse qui me laisse supposer qu’ils ne comprennent pas eux même le droit d’auteur. Il y a quand même une petite différence entre une oeuvre dans le domaine public et le fait de recopier le concept et la direction artistique d’une oeuvre que l’on avait sur son site 2h plus tôt mais dont on ne voulait pas créditer l’auteur.
MAJ 18h
En fin d’après-midi, les provocations sur twitter à grands coups de montages photo pour essayer de me faire passer pour une idiote continuent :) Je précise à ce stade que je ne leur réponds plus depuis 13h.
Maj du lendemain
Dois-je donc prendre ça pour un aveux de « vol » de mon contenu mais on s’en fou parce que tout le monde le fait, ou une nouvelle provocation ?
Au final pas faire grand chose à part tenter d’être au dessus de tout ça, savoir que mon travail vaut mieux que ce genre de comportements, et vous encourager à partager mon illustration. Elle est là pour ça, je l’ai mise sous licence CC-BY pour ça, et je suis ravie quand elle sert à un article. Tout ce que je demande en échange c’est de respecter mon droit d’auteur. Vous pouvez également regarder la conférence de Josh Clark » The Seven Deadly Myths of Mobile » qui m’a inspiré l’illustration.
Dernière chose : ne les mentionnez pas sur les réseaux si vous partagez cet article. Non pas parce que je n’assume pas, mais parce qu’ils cherchent à se faire du buzz et je ne compte pas les y aider.
Maj du 9 avril
Pour le moment il semblerait qu’ils aient décidé de retirer mon illustration pour y mettre de la publicité à la place. Bon, il ne s’agit pas d’excuses, mais plus d’une provocation » on a fait du buzz, on a eu pleins de cliques sur la page, donc on va mettre de l’adwords sur le page histoire de générer de l’argent et nous moquer encore un peu plus de vous « . Vous vous doutez que je n’ai pas de réelles excuses de leur part.
Du coup le timing me fait sourire car j’ai justement en préparation un petit article condensé sur la gestion de la publicité dans le responsive suite à la mise à jour de ma formation sur le design et l’ergonomie mobile (dans un contexte responsive) pour les Echos.
Un peu d’humour né de ce chaos
De tout ce chaos est au final né le compte parodique Ceralnteractive sur twitter. Je n’ai aucune idée de qui en est l’auteur, j’espère qu’ils n’aura pas trop d’ennuis. Mais j’avoue que le jeu sur la lisibilité du I et du l dans certaines polices d’écritures est très subtile. Bien joué, c’est un joli pied de nez de graphiste, il fallait y penser.
Edit : le compte twitter a été supprimé depuis.